Vous avez peut-être vu les vidéos de Florian Fiquet, aka @flo_climatrek, dans votre feed Instagram ces derniers temps. Cet été, l'aventurier engagé de 31 ans, a notamment arpenté les Pyrénées dans le but de sensibiliser à la disparition des glaciers de ce massif particulièrement touché par le réchauffement climatique. Il nous a raconté comme lui est venu l’envie de s’engager en faveur du climat, fruit d’une reconversion amorcée sur l’HexaTrek, l’une des plus longues randonnées françaises, qui sillonne le territoire sur plus de 3000 kilomètres.
Tu te définis sur les réseaux sociaux comme étant un éco-aventurier, ça veut dire quoi exactement ?
C’est un terme qui regroupe deux aspects selon moi. La réalisation de projets d'aventure, de voyage, ayant une visée de sensibilisation écologique autour de la réduction de son impact environnemental, d’une part. Mais aussi, créateur de contenu sur les réseaux sociaux. Certains peuvent dire “influenceur”. Quoi qu'il en soit, j'adore partager sur les réseaux, créer des choses. En résumé, je partage mes éco-aventures sur les réseaux sociaux.
Quand as-tu commencé ton activité sur les réseaux sociaux ?
C’était il y a deux ans, lors de ma reconversion professionnelle. J'ai vraiment créé ma page Instagram à ce moment-là. Mais j’ai toujours eu, je pense, cette facilité, et surtout ce plaisir, à créer des contenus, à faire des petits montages, à prendre des vidéos, des photos et finalement gérer les réseaux sociaux des ONG pour lesquelles j’ai pu travailler. Car si à la base, j'étais chargé de projets, j'en venais tout de même à m’occuper de la com, du site Internet, de la visibilité, des newsletters, mais aussi des réseaux sociaux. Parce que c'était des structures pas trop grandes. J’ai développé la plupart de ces compétences dans la sphère professionnelle à l’origine.
Tu faisais quoi exactement avant de te lancer sur les réseaux ?
J’ai travaillé dans des ONG qui défendent les droits humains - j’ai notamment travaillé pour l’ONU. Tout ce qui tourne autour de la géopolitique et des relations internationales, ça m’a toujours passionné. Ça continue de le faire, d’ailleurs. Je touchais un peu à tout, que ce soit à l'ONU puis après dans une ONG où j'étais engagé en tant que chargé de projet : assister à des réunions, faire des rapports sur des sujets précis que l'on défend. Les droits des femmes, les droits des enfants, les réfugiés, par exemple. Mais aussi organiser des événements, faire des workshops, des sessions de formation sur les mécanismes de l'ONU.
Puis en 2022, je suis parti à l'étranger, notamment en Jordanie. Là, c'était davantage de l'humanitaire. Je faisais parti d’un programme européen qui envoyait des gens sur le terrain, au contact direct avec les personnes sur place. C’est à ce moment-là que je suis entré dans la phase de communication. L’idée, c’était de mettre en avant ce que l’on faisait sur le terrain, les causes que l’on défendait, les événements que l’on organisait.
Tel que tu le présentes, ça a l’air hyper intéressant. Pourquoi avoir choisi de te reconvertir ?
Effectivement, c’était cool. D’autant que c’était un chemin que j'avais vraiment choisi, et qui avait du sens à mes yeux. J'étais content d’évoluer dans ce milieu. Sauf que j'étais parfois un peu frustré par le côté trop abstrait. Quand j’étais à Genève, c’était beaucoup de blabla. Et même en Jordanie, c'était beaucoup de procédures pour un peu de terrain. Et je crois qu'il y avait quand même aussi très concrètement un désir de me lancer seul en faisant mes propres projets, de manière assez libre. Sans avoir plein de gens autour. Sans devoir aller voir telle personne, puis ensuite telle personne, puis attendre que machin revienne avant de prendre une décision.
Et à quel moment ce rêve d'indépendance devient-il réalité ?
Fin 2022, je dirais. Je vivais avec mon ex en Suisse à cette époque. Cela faisait 6 ans que nous étions ensemble. Je l'ai quittée, ainsi que mon appartement. J'ai vraiment tout laissé. Puis je suis parti en Jordanie, avant de rentrer en France. C’était la première fois que je me retrouvais très léger, très libre finalement. Même si ça n’a pas été une période facile parce que j'avais plus de repères. Mais en même temps, le champ des possibles s'ouvrait à nouveau. Et ça me faisait du bien de ressentir cela. C’est donc en 2023, dans cet état d'esprit-là, que je suis parti faire l’Hexatrek [3034 kilomètres et 136 000 D, ndlr] sans trop savoir où ça allait me mener, je l'avoue. J'avais tout de même quelques idées. Déjà, je voulais partager ça sur les réseaux, rencontrer les acteurs dans le milieu de l’environnement, voir le changement climatique avec mes propres yeux, mais surtout me lancer dans une grande aventure. L’HexaTrek était la rando parfaite pour ça. Ce fut une formidable immersion en pleine nature. J’étais très souvent seul. Ça s'est hyper bien passé. C’est à ce moment-là que je me suis dit: “Tu peux faire ce que tu veux, si t'en as vraiment envie. Alors, vas-y, vu que tu kiffes trop faire ça, essaye de voir ce qu'il va se passer après”. Et comme par hasard, après l'HexaTrek, je suis tombé, en octobre 2023, sur l'appel à projet Sport Planète Maïf qui finance des éco-aventures. J’ai postulé. Et j’ai été pris. Ça a lancé la machine. Puisque ça m’a permis de voir que j’arrivais à bien faire les choses. Et à gagner en confiance. L’Hexatrek, c’est tout de même 3000 kilomètres. On ne s’y lance généralement pas sans avoir un petit background en rando…
J’étais bien loin d’être un expert rando lorsque je me suis lancé sur l’HexaTrek. Je ne savais absolument pas si j’allais être capable de le finir. Car avant cela, j’étais parti pendant dix jours dans les Alpes en 2020 ou 2019, sur le GR5, avec mon ex de l’époque. Et sinon, je faisais des randos la journée, du sport, mais sans expertise particulière. Des personnes viennent souvent vers moi en me disant qu’ils souhaitent faire l’HexaTrek. Mais qu’ils ne se sentent pas prêts. Mais en fait, l’itinéraire est tellement long que l’on peut vraiment prendre le temps de développer nos connaissances en rando. [...] J’ai fait le choix de la France parce qu’il avait cette volonté de ne pas prendre l'avion, de ne pas faire une aventure en Australie ou en Nouvelle-Zéland, pour des raisons écologiques. Et puis, en France, il y a tellement de choses à voir. J’avais envie d'aller dans les petits villages, dans les Vosges, dans les Pyrénées… pour prendre vraiment le temps de découvrir ces lieux-là.
Tu partages tes aventures sur les réseaux. Mais aussi des réflexions sur les questions environnementales. As-tu toujours une sensibilité écologique ?
Plus ou moins. Gamin, j'ai eu une méga sensibilité à la nature. Parce que mes parents étaient agriculteurs. Ils avaient des chèvres, faisaient du fromage dans le sud de la France, au nord de Montpellier, au pied des Cévennes. La maison, elle était au milieu de nulle part, donc en fait, je passais mon temps dehors avec mon frère. Ça m'a permis de développer une relation spéciale avec la nature. Si bien qu’en ville, je ne me sens pas hyper bien. L'engagement écologique, il est venu plus tard. Même si mon enfance en a été un terreau fertile.
En 2022, j'ai commencé à lire, à écouter des podcasts, à suivre des gens sur les réseaux. Camille Etienne, par exemple. Son discours m’avait énormément inspiré. Et donc, de fil en aiguille, car c’est venu petit à petit, j’ai commencé à m’engager. Je trouve que c'est important de le dire, que ce n'est pas une révélation qui tombe sur la tête. Il faut se renseigner d’abord. Tout était tellement logique que j’ai voulu y mettre ma force de travail.
Quand on met le nez dans les sujets environnementaux, ça peut être assez déprimant, au vu de la somme de ce qu’il nous reste à accomplir. Mais aussi vis-à-vis de notre impuissance. Comment est-ce que tu fais pour garder un état d'esprit positif ?
Je suis assez positif, c’est vrai. Je crois que l'éco-anxiété, je la transforme en action. Et en fait, en me lançant dans des projets liés à l'écologie, je me suis jamais senti aussi heureux de ce que je fais. Parce que j’y trouve clairement du sens. Alors aujourd'hui, c'est sûr que les nouvelles plombent le moral. À tous les niveaux. Et comme je suis très optimiste par nature, je préfère passer des messages de manière positive et joyeuse. Parce que je pense que ce sera mieux accueilli aussi.
As-tu prévu de refaire une autre rando long cours, dans le même genre que l’HexaTrek ?
Oui, j'aimerais bien refaire ça, parce qu'aujourd'hui, je me lance sur plein de petits projets. Et c'est génial. Parce que c'est ma passion, c'est incroyable. Mais j'aimerais bien retrouver les sensations que j’avais pendant l’HexaTrek. J'ai vu qu'en France, il y a un sentier qui s'appelle “Le chemin sauvage”. Il fait 4000 kilomètres. On n'est pas en montagne, contrairement à l’HexaTrek. Mais plus dans la France sauvage, vraiment rurale. Tu pars de Bretagne, tu descends vers les Pyrénées. Puis tu remontes toute la diagonale du vide jusque dans les Ardennes. J’aimerais faire ça, peut-être en 2026.